Au tour de Marika de nous raconter son aventure de l’expatriation, elle vit depuis 10 ans au Mexique.

Prénom : Marika (j´ai du adopter le diminutif « Marik »)
Âge : 36 ans
Situation professionnelle : Actuellement mère au foyer, ayant travaillé 7 ans comme professeur de FLE (Français Langue Étrangère)
Etudes : Licence d´histoire et maitrise en médiation culturelle en France
Situation personnelle : En couple depuis 2008 avec Rafael, mariée depuis 2010, 3 enfants (2 garçons et une fille : Arek 6 ans, Ikal 4 ans et Aki 9 mois), 4 chats (hipoline, fobos, tchatcha, quico)
Expatriation : Je vis depuis 2008 au Mexique, 2008-2010 Irapuato (Guanajuato, état au centre du pays), 2010 Cuernavaca (Morelos, état au sud de la capitale Mexico DF), 2010-2014 Irapuato (encore), depuis 2014 San Miguel de Allende (Guanajuato).

J´ai travaillé 2 ans à Annecy puis j’ai quitté mon emploi de chargée de communication dans une association d´art contemporain. Entre le niveau de vie de la ville et mon salaire, je n´y arrivais plus.

Je suis alors revenue 6 mois chez mes parents dans un petit village de la Drome, tout en faisant du bénévolat sur des festivals et événements culturels.

Je voulais apprendre l´espagnol en Amérique, alors j´ai envoyé beaucoup de CV surtout dans des Alliances Françaises du Chili au Mexique. J´avais quelques retours positifs en Argentine, mais ils ne me payaient pas. Finalement, j´ai été prise en stage rémunéré à Irapuato au Mexique à l´Alliance Française où j´étais logée et payée.

Durant ce 1er mois dans une Alliance Française au Mexique, j´ai rencontré mon futur mari qui prenait des cours du soir. Mon contrat durait un an, à la fin de celui-ci je suis rentrée 2 mois en France et j’y suis retournée pour le retrouver.

La 1ère fois, j´avais d´office un visa touristique de 180 jours, puis l´alliance française demandait et payait le visa travail. Quand je suis revenue la 2ème fois, j’avais également le visa touristique de 180 jours. Au bout de 4 mois, j´avais du travail, mais l´entreprise ne voulait pas faire les démarches de légalisation ni les payer. Alors soit je sortais du territoire (Guatemala, Etats-Unis) mais c´était compliqué et cher. Soit je me mariais. Alors au bout des 6 mois, on s´est marié civilement avec Rafa, d’obtenir mon visa de rapprochement familial. Ensuite nous avons fait reconnaître le mariage en France à la naissance de notre 1er enfant, 1 an et demi après. Maintenant, c´est beaucoup plus compliqué, il faut faire les démarches depuis la France avec l´ambassade du Mexique, payé le visa pour pouvoir entrer au Mexique.
Aujourd´hui, je suis résidente permanente, plus simple pour tout, j´ai obtenu ce statut suite á 4 ans de résidence temporaire familiale, chaque cannée, je devais renouveler et payer.

Comment s’est passé ton déménagement ?
Pas de déménagement, je suis juste partie avec mes valises (2 de 23 kg).

As-tu envie de revenir vivre en France ?
Parfois, j´ai envie de rentrer, surtout depuis que j´ai les enfants et parfois non.

Qu’est-ce qui t’a le plus choquée en arrivant au Mexique ?

Il y a pas mal de choses, dont :

– les gens qui boivent du coca à la place de l´eau (ils en donnent même aux enfants);
– les odeurs de nourriture du matin au soir dans les rues et on peut manger à n´importe quelle heure;
– les gens ne sont jamais à l´heure et très très en retard;
– les magasins ouverts 7j/7;
– les policiers encagoulés;
– les bars où la musique est tellement forte qu´on ne peut pas s´entendre;
– le système de santé (public et privé).

Comment s’est passé ton apprentissage de l’espagnol ?

Lorsque je suis arrivée je ne parlais pas un mot d’espagnol. Au bout de 6 mois, je comprenais pas mal mais pour parler correctement j´ai dû attendre environ 9 mois. Socialement, compte-tenu de mon âge, que je ne suis plus étudiante, ça limite selon moi. Je vis comme la classe moyenne mexicaine, mes enfants vont à l´école publique. La différence est que je suis française et tous les 2 ans je rentre en vacances en France, je suis fille unique, mes parents retraités m´aident à acheter les billets d´avion pour pouvoir profiter de leurs petits-enfants. Eux viennent peu, c´est plus compliqué puisqu’ils ne parlent ni espagnol, ni anglais. On va dire que les gens avec qui je pourrais avoir le plus de points communs sont d´une classe sociale plus élevée, mais on n´a pas la même vie, ni les mêmes valeurs, ou encore accès aux mêmes loisirs… J´ai des connaissances mais pas vraiment d´amies intimes. Mes dernières amies datent de ma période universitaire.

Comment cette nouvelle vie à l’étranger t’a changée ?

Je suis devenue plus flexible (bien que je doive encore travailler cet aspect), je m´adapte mieux aux changements matériels et aux personnes. J´ai changé peu à peu mon alimentation, ma vision de l´éducation de mes enfants, mon rythme de vie, globalement mes exigences se sont recentrées sur l´essentiel.

Peux-tu nous parler de tes enfants ?

Mes 3 enfants sont nés ici au Mexique, ils ont tous la double nationalité.
J´avoue leur parler moins en français qu´avant, je trouve ça difficile, j´essaie de le faire mais parfois j´oublie, mon mari parle un peu mais la langue à la maison entre nous est l´espagnol. Je raconte au moins une histoire chaque soir et les livres pour enfants qu´on a sont tous en français, ils comprennent mais parlent peu.

Avec 3 enfants et pas de famille sur place pour nous aider, c´est difficile de travailler. Avant, quand on vivait à Irapuato, j´étais prof de français en université, collège et lycée. J´avais entre 20 et 30 heures de cours par semaine que je répartissais sur 3 ou 4 matinées de 7 à 14h. Petits, mes enfants étaient gardés par leur grand-mère, puis vers 9 mois ils allaient à la garderie de 8 à 13h. Cela a occasionné beaucoup de conflits avec elle mais c´était pratique et confortable. Je vis dans un pays où il y a beaucoup d´enlèvements d´enfants. Et il n´y a pas forcement de congés maternité, à chaque fois j´ai dû reprendre 40 jours après la naissance des enfants.

Quand je suis partie, je ne me posais pas de questions, je me disais que si jamais je le voulais je pouvais rentrer à tout moment, je ne crois pas qu´on parte totalement par hasard non plus. Beaucoup de gens partent 1 an ou 2 ans puis reviennent, c´est diffèrent de choisir de vivre dans un autre pays sur du long terme. Les années passent, on s´adapte mieux, les retours en France sont plus difficiles et pas forcément positifs, alors on est contents d´être là où on a choisi d´être.

Qu’est-ce qui te manque le plus ?

– que mes enfants passent des moments avec leurs grands-parents;
– le fromage, le vin, le chocolat et les pâtisseries, quelle gourmande ! (il y en a ici mais c´est cher);
– mes copines, mais même si je revenais je les verrais de toutes façons très peu.

Parfois, je pense rentrer plus pour mes enfants que pour moi. Pour qu´ils apprennent correctement le français, qu´ils puissent être libres de sortir á l´adolescence (ici il y a des problèmes d´enlèvements et de fusillades dans les rues…).

La cuisine
Au Mexique, il y a des supers plats, parfois les étrangers sont un peu malades au début mais moi jamais. On mange beaucoup avec les mains, dans la rue, dans des assiettes en plastique.
Tlacoyos, tacos, pozole, tostadas, tortas, soupe azteca, mole, tamales, enchiladas nopales (cactus) miam miam.
Question boisson alcoolisée, il faut goûter le mezcal, la tequila, les bières sont pas top, sauf les brunes. Ils sont très jus de fruits et eaux de saveurs (fruitée mais bien souvent super sucrée).
Oubliez les pizzas, ils y mettent de l´ananas et du jambon, beurk. Les trucs avec du chicharron, la peau du poulet séchée. Il y a des tacos de tout (de tête de porc, des yeux…). C´est difficile si tu es végétarien, puis ils mangent beaucoup de trucs frits. Les desserts ne sont vraiment pas tops. Mais les fruits sont délicieux, mangues, papaye, marracuya…
Ils mangent beaucoup de tortillas (galette de maïs), comme le pain, on s´habitue et en général beaucoup d´œufs.
Ils mettent du citron vert de partout, c´est délicieux et aussi du piment.

La culture
Ce qui est super ici, ce sont les fêtes, les mexicains ont toujours un truc à fêter. Il y en a beaucoup tout au long de l´année, certaines sont locales d´autres nationales. Pour les anniversaires, les traditionnelles piñatas, les fêtes locales avec les danses pré hispaniques, les trucs religieux ou spirituels, la fête des morts… C´est vivant et coloré.
Ce que j´apprécie le plus ici, c’est de ne pas être diabolisée ou étiquetée parce que je suis mère au foyer, mes enfants vont à l´école publique, donc j´ai très peu de temps pour moi. C´est du lundi au vendredi, maternelle dès 4 ans de 9 à 12h et primaire de 8 à 13h. Même si c´est fatiguant et souvent dur (ici souvent les mères ont une femme de ménage-nounou à la maison toute la journée avec elle qui les aide), je peux les voir grandir, être avec eux et ne pas courir. C´est aussi l´une des raisons qui ne m´encourage pas au retour, je ne me vois pas les voir seulement 2h par jour. Education souple, horaires, être avec eux, dormir avec eux.
J´apprécie que pour mon 2ème enfant, j’ai pu accoucher chez moi sans problème légal.

Mes conseils seraient d´être ouvert, d´arrêter de râler ; les français râlent sans cesse de tout et de rien et ne savent pas reconnaître les bienfaits de certaines choses. Pour les personnes entreprenantes avec des idées, il y a de la place ici mais il y a aussi des contreparties, aucune aide sociale, peu de vacances, système de santé pourri, malhonnêteté, corruption….

2 commentaires

  1. Emmanuelle CM

    Cet article est très intéressant, j’aime beaucoup le concept. Découvrir le parcours de quelqu’un et en même des informations sur un autre pays est enrichissant.

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  2. Kenza

    Ca fait du bien de lire un portrait honnête et des opinions sincères. Courage Marika, j’espère que tu arriveras à prendre une décision.

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